les résidences

Depuis 2007, Textes en l’air accueille des autrices et auteurs en résidence sur le territoire autour d’un thème qui sert de fil rouge à la programmation du festival…

En 2025, textes en l’air accueille deux autrices en résidences d’écriture, Sabine Revillet et Jeanne Lepers…

sabine revillet

Ce qui aurait pu être évité (titre provisoire)

Ce texte s’inscrirait à la suite d’un texte écrit, précédemment : Effraction, dans lequel il est question de tourisme, de voyeurisme, de faits divers qui se situe dans l’attente que quelque chose de nouveau
arrive.

Là, dans Ce qui aurait pu être évité, quelque chose est en train d’arriver, c’est en cours, les personnages se tiennent aux aguets et sentent bien que ce qui se produit aura des effets, des conséquences. Il est question d’apparence (tenir les apparences avant que le système flanche), de
catastrophes (intérieures et extérieures), de nos peurs – attractions, sentiment d’impuissance face à ce constat : la nature est plus grande que nous, et nous ne pouvons pas tout maitriser, et de lieux.

J’ai envie de parler des lieux. Les lieux dans lesquels on vit et dans lesquels on inscrit nos empreintes, on s’y abrite, on s’y protège, on se crée une vie qui n’appartient qu’à nous, et de parler des lieux à éviter, des lieux où des catastrophes se produisent, on regarde tout ça de loin à la télé, assis sur son canapé.

Parfois, la catastrophe arrive, elle s’installe chez soi (catastrophe intime, séparation par exemple, ou burn out, évènements difficiles à vivre avec cette sensation d’entrer dans un gouffre, mais qui, avec du recul, sont des évènements qui nous amènent à nous penser autrement, penser d’une autre façon sa vie, on tire de tout ça des apprentissages, pour les lieux c’est la même chose, on démolit des immeubles et les pierres, les gravats serviront à créer, à nouveau, quelque chose, autre chose.)

Sabine Revillet est autrice de pièces de théâtre pour tous les publics, enfant, adolescent et adulte.

86 400 secondes, Éditions Théâtrales, 2024
L’histoire des Pouatches, coécrit avec Julien Rocha, Éditions Koiné, 2023.
Mon grand-père, ce robot, Éditions Théâtrales, 2022.
L’union fait le papillon, Recueil liberté, égalité… Éditions Théâtrales, 2022.
MUR (S), collection Les Incursions, Koiné, 2021. Coécriture avec Marie-Pierre Cattino, Camille Davin, Émilie Leconte. Éditions Koiné.
Les Lunatiques, Éditions Koiné, 2018. Prix du département de la Mayenne, 2020
Allumeuse, dans le recueil Embras(s)er la nuit Éditions Koiné, 2018.
Hors service, Éditions Color Gang, recueil collectif : Robots, clones et Cie, 2017.
Pardon, Éditions du Cygne, 2017
Amicide, et Têtes et grands pieds, et Quand on aime on ne compte pas Éditions Dramedition, recueil collectif, (tome 3, tome 3 bonus et tome 4 ) 2017.
Berlingot, nouvelle parue dans la revue Espace(s)-Cnes, 2017
Aglaé au pays des malices et des merveilles, Editions Librairie Théâtrale, 2016. Lauréat du OFF 2015
Fissure de sœur, Éditions Théâtrales, 2010. Prix Guérande et Journées de Lyon
La peau du mille-feuilles, Éditions Lansman, 2009.


jeanne lepers

la bête broutait
que pouvait-il y avoir de plus ?

(titre provisoire)

Une jument vit seule dans un pré clôturé.
Elle broute les brins d’herbe du pré, les mâche, les avale, lève le regard vers on ne sait quoi, attend on ne sait quoi, subit les assauts de la mouche, retourne à ses brins. Une bien belle journée de jument.

Elle participe sans le savoir (enfin, qui sait ?) à la perpétuation d’elle-même, de son espèce, de l’immense « buisson du vivant ».

Cette jument est captive, elle n’est pas sauvage. Sa vie organique, son comportement, son imaginaire aussi peut-être, témoignent d’une imbrication subtile, contrainte et millénaire de son espèce, les chevaux, et de la nôtre, les humains. Parfois sa propriétaire la visite. Elle la coiffe, lui met des noeuds-noeuds dans la crinière et la dresse. Au pas, au trot, le mords dans la bouche et le sucre au bout de la course. Une bien belle relation.

La jument rêve aussi. De gambades dans les herbes hautes avec un poulain aujourd’hui disparu.

Je souhaite sonder la vie intérieure d’un animal, en l’occurence d’une femelle de l’espèce chevaline. Ses actions répétitives, ses absences, ce qu’elle entend, ce qu’elle voit, le regard au ras des pâquerettes ou plongé dans le lointain. Reliée au trivial et à l’immensité.
Témoignant peut-être de ce que c’est qu’exister « pour rien » ou « malgré tout ».

Dormir, manger, déféquer, manger, dormir, « rêver peut-être »

Le temps de la jument est rempli de gestes triviaux, sans cesse à recommencer. L’écriture travaille cette répétition jusqu’au vertige. Témoignant ainsi de cette obsession à vivre, nous révélant quelque chose de notre présence sur terre, cette présence absurde, sans queue ni tête, sans scénario préalable, mais profondément guidée par un je ne sais quoi de nécessaire. Un devoir d’être.

En plongeant dans le vécu bête et méchant de cette jument, je souhaite mettre en lumière l’étrange manière qu’a le vivant de s’organiser. Sans morale, sans justice, sans programme. Au gré des brout-brouts, de la lutte inlassable avec la mouche, des séances de coiffage et de dressage avec sa propriétaire, des rêves la nuit d’un passé révolu, une destinée se dessine. Tout cela depuis l’enclos, porté par une dramaturgie qui laboure plus qu’elle ne propose une intrigue.

Que pouvons nous imaginer de ce que nous ignorons ? (V. Despret)

Écrire pour un animal aujourd’hui est un geste ambigu, à l’heure où l’activité humaine provoque la disparition massive des autres espèces, mais aussi alors que se pose de plus en plus la question de l’appropriation culturelle.

On pourrait même dire que parler pour un animal est une entreprise vaine. Il restera toujours une part insondable dans la subjectivité de la bête puisque cette dernière ne parle pas. J’ai toujours écrit pour défricher des zones que je n’arrivais pas à parler (dans la famille, dans le duo amoureux, dans la vieillesse féminine). Parler était une conquête, une entreprise risquée, un saut dans l’inconnu. Ici la tentative sera : sympathiser avec une autre espèce que la mienne. Gageons qu’une beauté – maladroite, fragile – résultera de ce saut. Elle sera le fruit de l’imbrication de mes propres projections sur cette jument solitaire (labeur/travail, femelle/féminité, dressage/soumission, mammifère/maternité), de mon désir de comprendre (et de mettre en mots) la singularité du vécu d’un animal dans un enclos.

Jeanne Lepers est notamment autrice et metteuse en scène au sein de La Compagnie Bloc

Un Caillou dans la Semoule, forme courte lauréate du concours d’écriture du Théâtre du Rond Point (2009)

Le bon fruit mûr, tout son sang reflua dans son cœur, Studio Théâtre de Vitry, Théâtre Les Passerelles à Pontault Combault, L’Etoile du Nord à Paris, Le Phénix à Valenciennes (2023)

Les Premiers, Lyncéus Festival (2018), Théâtre de Belleville (2020)

Le Projet Clown (2013-2014) recherche autour d’un duo de clown : co-écriture et co-mise en scène au plateau avec Édith Proust. Regard extérieur : Pauline Bolcatto. Présentations de sortie de résidence au Théâtre Beliâsche à Aurillac et au Théâtre de La Loge.

Bloc, Prix Paris Jeunes Talents 2011 : Théâtre des Déchargeurs, Théâtre de Vanves, Un Festival à Villeréal, Le Centquatre, Le Chapiteau de Clichy-sous-Bois (2010-2012)


Les résidences d’écriture passées

2007 : les Z’Habitants – Catherine Zambon.

2008 : Objets de mémoire et mémoire d’objets – Éric Durnez (Belgique).

2009 : (H)istoires de femme(s) – Carole Thibault.

2010 : Tant et temps d’utopies – Perrine Griselin et Sylvain Levey.

2011 : Butins de familles – Dominick Parenteau-Lebeuf (Québec), Gustave Akakpo (Togo), Sébastien Joanniez (France).

2012 : Vas-y, traverse ! – Marilyn Perreault

2013 : De nord en sud et vice-versa – Hajar Bali (Algérie) en co-écriture avec Sébastien Joanniez (projet en partenariat avec l’ACCR-Sud Grésivaudan) et un projet avec François Chaffin.

2014 : Nos monstres – Marc-Antoine Cyr et Aurianne Abécassis.

2015 : Embarquements, débarcadères : itinéraires d’exil – Clémence Weill et Karim Demnatt.

2016 : Volte-face contre les barbaries – Blandine Costaz, Carine Lacroix et Jérémie Fabre.

2017 : Partir ou rester ? – Carine Lacroix et Suzie Bastien.

2018 : Imagine après… – Caroline Stella et Damien Dutrait ; Barbara Métais-Chastanier et Marie Lamachère ; Suzie Bastien

2019 : Féminin : singulières, plurielles, elles sèment… – Claire Rengade, Sonia Ristic et Suzie Bastien

2020 : Travailler, c’est trop dur – Pauline Guillerm

2021 : Résister, collectivement – Louise Belmas et Geoffrey Dahm

2022 : Vos papiers ! Nos identités… – Caroline Stella et Marine Bachelot Nguyen

2023 : Hors champs… – Lætitia Ajanohun et Karima el Kharraze

2024 : Rencontre.s – Sébastien Joanniez et Julie Aminthe